Bulletin de l'été - George Woodcock, L’anarchisme. Une histoire des idées et mouvements libertaires, Lux, frs 35.10

George Woodcock, L’anarchisme. Une histoire des idées et mouvements
George Woodcock, L’anarchisme. Une histoire des idées et mouvements libertaires, Lux, frs 35.10
Dans leur collection « Instinct de liberté », les éditions Lux propose depuis quelques années de faire découvrir ou redécouvrir d’importantes contributions, classiques ou contemporaines, à la pensée anarchiste. À côté de plus petits volumes proposant des textes des grandes figures de l’anarchisme, on peut noter la publication de ce livre classique consacrée à l’histoire de l’anarchisme, traduit ici pour la première fois en français, depuis sa parution au début des années 1960. Woodcock se propose de faire l’histoire de l’anarchisme dans sa forme « classique », c’est-à-dire d’un courant intellectuel et politique apparaissant et se développant avec la société industrielle au début du XIXe siècle et s’achevant avec la guerre civile espagnole en 1939. Fort bien documenté, ce texte aborde cet anarchisme classique à la fois dans sa dimension théorique, avec une première partie consacrée à l’histoire de « l’idée » – passant en revue les contributions de Godwin, Proudhon, Stirner, Bakounine, Kropotkine et Tolstoï – , et dans sa dimension politique, la seconde partie étant dédiée à l’histoire du « mouvement », relatant les flux et reflux, les succès et les déboires des groupes anarchistes dans plusieurs pays d’Europe. L’auteur tire un bilan plutôt pessimiste du mouvement anarchiste historique, mais se montre optimiste quant à la pérennité de l’idée anarchiste.
On peut sans doute regretter que l’histoire de « l’idée » et celle du « mouvement » soient ainsi séparées au lieu d’être articulées, mais cela tient à l’époque où ce livre fut écrit. Autre travers qui s’explique par l’époque, on aurait aimé voir l’auteur se montrer plus critique envers certaines positions misogynes d’un Proudhon, par exemple, et, plus généralement, intégrer la critique d’autre formes d’oppressions, qui n’était pas absente de l’anarchisme « classique » (qu’on pense par exemples aux anarchistes féministes qu’étaient Louise Michel, Voltairine de Cleyre ou Emma Goldmann, à peine mentionnées en passant). Mais ce texte reste malgré cela tout à la fois une introduction assez complète et un vibrant plaidoyer pour l’anarchisme, que l’on rangera aux côtés du recueil Ni Dieu, ni maître du controversé Daniel Guérin, de l’Histoire du mouvement anarchiste en France de Jean Maitron. FV