L'école Ferrer de Lausanne
Charles Hiemberg, Jean Wintsch, « L’Ecole Ferrer de Lausanne »,
Charles Hiemberg, Jean Wintsch, « L’Ecole Ferrer de Lausanne », Entremonde, 2009
« Un enseignement concret, pratique, vivant. » Telle fut la cause de l’Ecole Ferrer de Lausanne, ouverte de 1910 à 1919, d’abord à Chailly puis à la rue de la Madeleine. Comme son nom l’indique, cette institution se réclamait des « Ecoles modernes » fondées par le pédagogue libertaire Francisco Ferrer y Guardia (1859-1909). Il s’agissait de dispenser aux enfants de la classe ouvrière un enseignement plus libre, plus émancipateur que celui proposé par l’école publique (qui, justement, n’était ni libre ni émancipateur).
Il s’agissait de travailler de concert avec leurs parents et le monde ouvrier en général : « pour élever des enfants ouvriers il est peut-être bon de consulter les ouvriers ». Il s’agissait, enfin, de mettre en pratique une pédagogie qui, entre autres nouveautés scandaleuses, rassemblait garçons et filles dans la même salle de classe…
En soixante pages qui se lisent avec beaucoup de plaisir, ce livre confronte un texte de l’historien Charles Heimberg et un compte-rendu de Jean Wintsch, fondateur de l’école, qui revenait en 1919 sur cette aventure. Tous deux racontent une histoire mouvementée, rappellent les principes pédagogiques hérités de Ferrer, et ne cachent ni les échecs ni les limites de l’expérience : « Le personnel enseignant de l’Ecole Ferrer (…) fut en somme médiocre », écrit ainsi Jean Wintsch, catégorique.
Au-delà d’une histoire parfois chaotique, ce qui est passionnant ici, c’est la modernité du discours. La mixité en classe n’est plus un tabou mais que dire des sanctions, des devoirs à la maison, du travail de groupe ? Sur tous ces sujets, la réflexion des pédagogues de l’Ecole Ferrer est toujours d’actualité. C’est pourquoi ce livre passionnera non seulement ceux qui s’intéressent à la pédagogie et à son histoire mais, plus largement tous ceux qui, parents ou non, côtoient régulièrement ces créatures étranges que sont les enfants.