Un dimanche soir en Alaska - Don Rearden
Don Rearden, Un dimanche soir en Alaska, traduit de l’anglais par
Don Rearden, Un dimanche soir en Alaska, traduit de l’anglais par Hélène Amalric ; Fleuve, 2015, 416 p., CHF 31.70
Etrange roman. Une série de personnages plutôt sympas, dans un village yupik de l’Alaska en train de s’écrouler (s’écouler ?) dans la mer de Bering. La mort qui menace, mais aussi des passages à mourir de rire… On pense aux réserves indiennes, un peu mieux connues par la littérature et le cinéma que les réserves eskimo, où les habitants vivent de subventions sans rien avoir à faire qu’à boire et à baiser, se rappelant les traditions de leurs peuples avec quelque mauvaise conscience.
Le roman a une construction habile et prenante. Des habitants, jeunes et vieux, tous attachants avec leurs préoccupations intimes et collectives, sont confrontés aux militaires chargés de les évacuer, aux représentants maladroits des autorités, aux menaces de l’océan. Rassurez-vous, ça finit bien pour presque tout le monde.
L’auteur commet toutefois une erreur rédhibitoire, à l’heure où le changement climatique monopolise toutes les peurs – ou laisse-t-il délibérément planer l’ambiguïté ? Car, sur cette bande de terre en Alaska, l’ennemi principal n’est pas la « simple » fonte du pergélisol et l’avancée de la mer qui ronge les rives : tout cela est une conséquence des activités humaines, la surpêche au saumon, les grands navires qui ébranlent un sol fragile, la situation d’assistanat faite aux populations locales. Le changement climatique n’est pas une fatalité ; mais il faut lire entre les lignes pour comprendre que c’est en amont qu’il faudrait faire quelque chose. Parler au sujet des habitants de Salmon Bay des « premiers réfugiés climatiques du monde » n’a guère de sens, sauf à les pousser encore plus à la résignation.
M.E.