Catherine Larrère, L’écoféminisme

Catherine Larrère, *L’écoféminisme*, La Découverte (« Repères »), 2023

Bien qu’il ait le vent en poupe, la littérature en langue française consacrée à l’écoféminisme reste rare. On voit certes paraître de nombreux écrits d’intervention que l’on peut ranger dans cette catégorie, mais une introduction synthétique qui permette de se familiariser avec ce mouvement faisait encore défaut, si l’on excepte le recueil d’Emilie Hache, Reclaim, paru chez Cambourakis en 2016. La philosophe Catherine Larrère nous propose ici une présentation accessible de l’histoire des mouvements qu’on peut rattacher à l’écoféminisme et des enjeux théoriques et conceptuels qu’ils soulèvent. Sans chercher à arrêter une définition, qui ne saurait de toute manière pas rendre compte de la complexité et de la profusion des luttes écoféministes, l’autrice retrace plutôt un ensemble de parcours intellectuels et militants en suivant, tout autour du globe et en particulier dans le Sud global, les mouvements associant luttes de femmes et luttes écologiques. L’écoféminisme suscite souvent une certaine méfiance, tant parmi les féministes que parmi les écologistes, et l’on reproche facilement à ce mouvement d’essentialiser le lien entre les femmes et la nature. Si cette thématique traverse d’une certaine manière l’ouvrage, Larrère n’entend pas apporter à de telles critiques une réponse simple. Elle relève toutefois que l’accusation d’essentialisme est souvent portée a priori, avant même d’avoir une connaissance un peu solide des luttes ou des traditions intellectuelles de ces mouvements. Moins intéressant lui semble de chercher à contrer les accusations que de mettre en lumières les questionnements multiples et les décentrements que produisent les luttes écoféministes : « Ces mouvements font se rencontrer le social et le naturel, et croisent les dimensions de genre, de classe et d’assignation racisée (avec l’écoféminisme décolonial). Ils ne sont pas porteurs d’une doctrine unique, mais, remettant en question les dualismes (hommes/femmes, hommes/nature) autour desquels s’organise la domination, ils font bouger les lignes ». FV

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