Pénurie - Meizoz & Zivo
Jérôme Meizoz et Zivo, Pénurie Lausanne, Art&Fiction, 2013 Sfr.
Jérôme Meizoz et Zivo, Pénurie
Lausanne, Art&Fiction, 2013
Sfr. 45.-
Un futur très proche. Un pays qui ressemble fort au nôtre. La menace, diffuse mais obstinée, d’un conflit oblige ses habitants, qu’on devine habitués au confort, à vivre en autarcie, et à connaître l’angoisse du manque. On économise les dernières conserves, on se chauffe au bois, on fait la queue devant l’épicerie… Outre les biens matériels, c’est l’information qui manque : « Des pannes informatiques entravent toutes les communications. » Et, faute d’information, « nul ne sait jusqu’à quand pourrait durer la pénurie. » Les enfants, qui patinent sur l’autoroute déserte, s’en sortent bien, mais l’on devine les adultes au bord de l’effondrement nerveux.
Par son thème, Pénurie évoque la littérature d’anticipation. Le dépouillement du texte, cette façon de dire beaucoup avec un minimum de moyens, évoquent des films aussi étranges et beaux que Stalker ou La jetée. Fruit d’un travail commun entre l’écrivain Jérôme Meizoz et le peintre Zivo, Pénurie n’est ni un roman, ni une bande dessinée, ni un livre d’art : c’est tout cela à la fois, et plus encore.
« Mais maintenant, tout est changé. On ne pourra plus échapper au grand tumulte. La réalité à nouveau s’est invitée dans nos rues. » Au fil des phrases brèves qu’aligne un narrateur solitaire, on finit par se rendre à l’évidence : non seulement ce pays qui s’était cru oublié par l’histoire est le nôtre, mais cette époque de guerre où, fatalement, les hommes apeurés partent à la chasse au bouc émissaire, est notre présent. Un livre magnifique.
NS